Lettres de Drancy

Introduction de Denis Peschanski
Editions Tallandier

"Ma très chérie. Nous voici en route pour X. Aucune idée. tous les tuyaux circulent, Allemagne, Pologne aussi bien que Pyrénées. On verra bien...
Ca peut être très long, mais on reviendra. Je ne crains qu'une seule chose, c'est de vous voir nous rejoindre. Le reste n'est qu'une aventure qui doit être supportable sans gros dommage. Au revoir, mon amour. Je vous embrasse tous quatre très très tendrement. Jean."


27 mars 1942, jeté du premier convoi Drancy-Auschwitz.

Ce recueil de 130 lettres témoigne de l'internement et de la déportation des Juifs de France entre 1941 et 1944. Une persécution dont l'été et le printemps 1942 constituent le tournant, avec la grande rafle du Vel d'Hiv et les premiers convois vers Auschwitz. Les internés, leur famille, de simples témoins disent leur angoisse, leurs préoccupations quotidiennes, leur bonheur interrompu, leur incompréhension.
Ils tissent un récit à plusieurs voix, issues de la France entière et convergeant vers le camp de Drancy, antichambre de la déportation et de l'extermination.

Il sera fait don des droits de ce livre au Centre de documentation juive contemporaine, Paris.

Si tu t'en sors...
Auschwitz 1944-1945

Nadine Heftler
Editions La Découverte

« Tu sais, si tu t'en sors, c'est une bien belle école... »
Ces mots qui ont fourni son titre au livre de Nadine Heftler furent les derniers qu'elle entendit de son père, Gaston Heftler, sur la rampe de Birkenau, le 2 juin 1944. Je pense qu'il était nécessaire, qu'il était indispensable de publier ce livre, et je voudrais dire pourquoi. C'est le récit des onze mois passés par cette jeune fille dans les camps nazis et publié tel qu'elle l'a écrit en 1946, peu après son retour en France. Elle l'a écrit en quelque sorte en dialogue avec ses parents, avec son père dont elle fut séparée immédiatement, avec sa mère qui, épuisée, fut selon ce qui a été dit, sur place, à Nadine, gazée le 14 octobre 1944. Elle l'a écrit comme on rédige, pour ceux que l'on aime, le texte d'une stèle funéraire, un écrit, pour ceux qui n'ont pas de tombe. Ce texte, il fallait le publier tel quel, avec simplement quelques minuscules corrections relevant de l'orthographe ou de la syntaxe. Car il faut considérer ce livre d'abord comme un document, comme un fossile qui réapparaît après un enfouissement de plusieurs décennies. c'est d'abord à ce titre qu'il peut et doit intéresser, voire passionner, le lecteur d'aujourd'hui. Nadine Heftler n'est ni David Rousset, ni Primo Levi. Et pourtant, par delà le divers historique, elle nous apporte quelque chose d'essentiel et de nouveau : quoi ? Elle même. Qui est-elle ? Une enfant, une bourgeoise française de quinze ans. Qu'il y ait eu chez elle « initiation » au sens que les anthropologues donnent à ce mot, initiation à un monde dans lequel elle a voulu, avec acharnement, survivre, ne fait absolument aucun doute. Initiation au double sens de ce mot : adaptation à un univers nouveau, et changement de classe d'âge, entrée dans l'âge adulte. L'épisode central, celui qui donne la clef et le sens de tout le livre est évidemment la séparation d'avec la mère, suivie de la mort de celle-ci. « Jusque-là, en réalité, je n'existais pas, je n'avais aucune personnalité, aucune force en moi-même. Maman partie, j'avais la sensation de naître subitement à la vie. De zéro que j'étais, le mot n'est pas trop fort, il fallait que je devienne en quelques minutes une unité. »
Extraits de la préface de Pierre Vidal-Naquet

Voyage à Pitchipoï

Jean-Claude Moscovici
Editions l'école des loisirs (collection Médium)

Voyage à Pitchipoï raconte la tragédie d'une famille juive, en France, pendant la guerre, une tragédie qui fut celle de millions d'autres familles. En 1942, l'auteur de ce livre avait six ans. Sa famille fut arrêtée, par des gendarmes allemands et français, et dispersée. Le narrateur et sa petite sœur furent d'abord confiés à des voisins jusqu'à ce que le maire du village fasse appliquer la décision du capitaine S-S, Commandeur de la région et responsable des mesures de répression antisémite : "L'accueil d'enfants juifs dans des familles françaises est indésirable et ne sera autorisé en aucun cas." Les deux enfants furent alors enfermés dans une prison, puis transférés au camp de Drancy, où la petite fille tomba malade, par malnutrition. Pendant toute cette période, ils restèrent sans nouvelles de leur mère, qui avait miraculeusement réussi à s'échapper et n'avait pas été reprise, malgré les portes qui s'étaient souvent fermées lorsqu'elle avait demandé de l'aide. Après des mois de vie clandestine, à la Libération, ils retrouvèrent leur maison. Ils ne devaient jamais revoir leur père.